Le Courrier de Paris, 12 septembre 1858, [p. 1-2] (article signé E. Reyer).
Chronique musicale.
J’ai été invité au festival de Bade ; j’y suis allé avec plaisir, et je suis revenu fort enchanté ; enchanté de ce que j’ai entendu et non moins encore de ce que j’ai vu. Je voyais Bade pour la première fois : mon admiration et ma surprise sont choses bien naturelles. Si je ne raconte rien de tant de merveilles, si je ne décris ni les ruines que j’ai visitées, ni les vallées que j’ai parcourues, c’est afin de rester dans ma spécialité et de ne pas me mettre gauchement à la queue de tant de touristes spirituels, de tant de chroniqueurs célèbres. D’ailleurs, le concert dirigé par M. Hector Berlioz était assez attrayant, assez splendide pour mériter à lui tout seul les honneurs d’une narration spéciale.
WeberWeber, Carl Maria vonCarl Maria von Weber (Eutin, 18 novembre 1786 – Londres, 5 juin 1826), compositeur. Il étudia avec son père, puis avec Johann Peter Heuschkel, organiste à Hildburghausen où sa famille s’était établie en 1796. L’année suivante, sa famille s’installa à Salzbourg où Weber étudia avec Lire la suite… marchait en tête du programme, terminé magnifiquement par l’ouverture de LéonoreOuverture de LeonoreBeethoven écrivit trois ouvertures pour son opéra Leonore op. 72. La première version de l’opéra Leonore, en trois actes, représentée le 20 novembre 1805, était accompagnée de l’ouverture Leonore no. 2 ; la deuxième version de l’opéra Leonore, en deux actes, représentée le 29 marLire la suite…, de BeethovenBeethoven, Ludwig vanLudwig van Beethoven (Bonn, 16 décembre 1770 – Vienne, 26 mars 1827), compositeur. Enfant prodige qui donna son premier concert public à Bonn à huit ans. Il alla à Vienne et prit des leçons avec Haydn de 1792 à 1794 puis avec Albrechtsberger de 1794 à 1795 et avec Salieri vers 1799. Il compLire la suite…. MM. Hector Berlioz et Henri LitolffLitolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite… ont ressenti les heureux effets d’un pareil voisinage ; le public qui se pressait dans le vaste salon du Cursaal savait d’avance qu’il allait assister à une fête musicale où il n’entendrait que de la musique, et les Parisiens qui se trouvaient là en avaient pris eux-mêmes bravement leur parti.
Il y a quelques années déjà que M. Berlioz a été prié par M. BénazetBénazet, Oscar EdouardOscar-Edouard Bénazet (Bordeaux, 30 mai 1801 – Nice, 2 décembre 1867), directeur de casino et entrepreneur. Fils de Jacques Bénazet qui était, à Paris, partenaire d’une dizaine de maisons de jeux, dont Le Casino de Paris jusqu’en 1837 quand les maisons de jeu furent interdites. Ayant étudiLire la suite… d’organiser ces grandes solennités qui ne sont pas le moindre attrait offert aux visiteurs, en dehors des émotions de la roulette. Je suis bien sûr que cet attrait serait irrésistible quand bien même les salons de jeu resteraient ouverts pendant toute la durée de la fête ; mais, par un excès de précaution, on les ferme. Le lendemain ils sont plus encombrés que d’habitude, et la banque peut aisément se dédommager de son chômage de la veille. Je suis resté huit jours à Bade, sans entendre dire que la banque ait sauté une seule fois ; j’ai eu beau me promener dans les bois environnans, je n’ai vu personne d’accroché aux branches. A Bade, il doit être fort difficile de faire croire qu’on s’est suicidé par amour, eût-on de l’or plein ses poches. Ceci n’est point une épigramme à l’endroit des jeunes personnes qui se montrent matin et soir dans toute l’ampleur de leurs étoffes sur la terrasse du palais BénazetBénazet, Oscar EdouardOscar-Edouard Bénazet (Bordeaux, 30 mai 1801 – Nice, 2 décembre 1867), directeur de casino et entrepreneur. Fils de Jacques Bénazet qui était, à Paris, partenaire d’une dizaine de maisons de jeux, dont Le Casino de Paris jusqu’en 1837 quand les maisons de jeu furent interdites. Ayant étudiLire la suite…, c’est une simple observation physiologique.
La salle de concert était très brillante et très animée ; on y entendait parler toutes les langues : c’était à n’y rien comprendre. Heureusement le bruit de la musique étouffait souvent le bruit des causeries intimes. Si on eût demandé à la partie féminine du public d’oublier pendant quelques heures qu’elle était dans le Salon de conversation, cela l’eût par trop contrariée dans ses habitudes, et un écriteau sur lequel on aurait écrit : Ce soir on ne cause pas ici, eût fait sans doute fort mauvaise figure au milieu de la riche décoration de la salle.
J’avoue cependant qu’on a écouté très religieusement le bel andante de Roméo et JulietteRomeo et JulietteRoméo et Juliette, symphonie dramatique, Op. 17, pour solistes, chÅ“ur et orchestre sur un texte d’Emile Deschamps d’après William Shakespeare, composée par Hector Berlioz et créée à la Salle du Conservatoire de Paris le 24 novembre 1839.Lire la suite…, un air des Noces de FigaroNoces de Figaro, LesLes Noces de Figaro (Le nozze di Figaro), K.V. 492, opera buffa en quatre actes sur un livret en italien de Lorenzo Da Ponte, d’après Beaumarchais, mis en musique par Wolfgang Amadeus Mozart et créé au Burgtheater de Vienne le 1er mai 1786.Lire la suite…, chanté par Mme Charton-DemeurCharton-Demeur, Anne-ArsèneAnne-Arsène Charton-Demeur (Saujon/Charente maritime, 3 mars 1824 – Paris, 30 novembre 1892), mezzosoprano. Elle étudia le chant à Bordeaux, où elle débuta en 1842 dans le rôle-titre de Lucia di Lammermoor (Donizetti). Elle se produisit ensuite à Toulouse et à Bruxelles et fit ses débuts Lire la suite… et le concerto-symphonie de M. Henri LitolffLitolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite…, exécuté par l’auteur lui-même. LitolffLitolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite… a excité une grande curiosité à Bade. Un marchand dont la boutique avoisine le Cursaal avait eu l’heureuse idée d’exposer le portrait du célèbre pianiste vêtu en apôtre. Pour que l’illusion fût complète, il n’y manquait qu’une auréole : le peintre l’avait mise ; l’artiste a eu la modestie de la faire effacer. A toute heure, des groupes de flâneurs stationnaient devant la boutique, et comme l’original n’était jamais trop éloigné de la copie, rien n’était plus facile que de vérifier la ressemblance.
A Bade comme à Paris, comme en Belgique, comme à Spa, comme partout où il s’est fait entendre, M. LitolffLitolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite… a obtenu beaucoup de succès. Son talent de compositeur a été non moins apprécié que son talent d’exécutant, qui est cependant des plus brillans, des plus merveilleux. Mais aujourd’hui, il n’est plus permis d’être un simple pianiste, et, décemment, un artiste ne peut pas venir dans un concert jouer, devant un public respectable, des Å“uvres qu’il n’a pas composées. C’était bon jadis, au temps fortuné de la variation et de la sonate.
Je ne reviendrai pas sur l’analyse que j’ai déjà faite du quatrième concerto-symphonie de M. Litolff Litolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite…; je constate seulement encore une fois, puisque j’en ai l’occasion, le très grand mérite de cette Å“uvre, et je me plais à répéter que cela est trop sagement écrit pour laisser le moindre doute à ceux qui s’obstinent à considérer M. LitolffLitolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite… comme l’un des plus fervens adeptes de la musique de l’avenir. On aurait bien voulu redemander le scherzo, mais il était trop tard : quand le tour de M. LitolffLitolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite… est arrivé, l’orchestre jouait depuis deux heures, sans trêve ni repos. Quelques minutes d’entr’acte à peine, ce qui était tout aussi insuffisant pour les instrumentistes que pour le public. Il ne faut pas conclure de là que M. Berlioz, chargé de la composition du programme, s’était fait la part du lion : il avait sacrifié, sans que personne ne le lui conseillât, la quatrième partie de Roméo et JulietteRomeo et JulietteRoméo et Juliette, symphonie dramatique, Op. 17, pour solistes, chÅ“ur et orchestre sur un texte d’Emile Deschamps d’après William Shakespeare, composée par Hector Berlioz et créée à la Salle du Conservatoire de Paris le 24 novembre 1839.Lire la suite…, et M. LitolffLitolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite…, pour répondre à cet acte d’abnégation, n’a fait exécuter que les trois premières parties de son concerto. La ballade de Victor HugoHugo, VictorVictor Hugo (Besançon, 26 février 1802 – Paris, 22 mai 1885), écrivain. Tête de file du romantisme, il publia de nombreux poèmes dont Odes (1822), Les Orientales (1829), Les Feuilles d’automne (1831) et surtout le manifeste du romantisme qu’est sa préface à son drame historique CromwellLire la suite…, Sarah la baigneuseSara la BaigneuseSara la baigneuse, ballade sur un poème de Victor Hugo mis en musique par Hector Berlioz. Berlioz composa trois versions de cette Å“uvre. La première version, écrite pour 4 voix d’hommes et orchestre, fut créée à la Salle du Conservatoire de Paris et dirigée par Narcisse Girard le 9 novembrLire la suite…, a valu à M. Hector Berlioz une fanfare de l’orchestre : c’est la manière usitée, en Allemagne, de complimenter l’auteur et de l’applaudir. La belle ouverture de LéonoreOuverture de LeonoreBeethoven écrivit trois ouvertures pour son opéra Leonore op. 72. La première version de l’opéra Leonore, en trois actes, représentée le 20 novembre 1805, était accompagnée de l’ouverture Leonore no. 2 ; la deuxième version de l’opéra Leonore, en deux actes, représentée le 29 marLire la suite…, qui est venue ensuite, n’a presque pas été écoutée : la moitié de la salle se levait pour aller rejoindre l’autre moitié. Il eût été préférable, peut-être, de mettre sur le programme : Finale… et de ne rien jouer du tout ; mais un concert ne paraît jamais trop long qu’à ceux qui l’écoutent, si excellentes que soient, d’ailleurs, les dispositions dans lesquelles ils se trouvent en arrivant. Cependant, je reste convaincu, bien que la recette fût destinée aux pauvres, que le public n’est pas venu à ce concert uniquement par charité : le luxe des toilettes et les applaudissemens prodigués aux artistes en sont la meilleure preuve.
Les strophes de Juliette ont été chantées par Mme Charton-DemeurCharton-Demeur, Anne-ArsèneAnne-Arsène Charton-Demeur (Saujon/Charente maritime, 3 mars 1824 – Paris, 30 novembre 1892), mezzosoprano. Elle étudia le chant à Bordeaux, où elle débuta en 1842 dans le rôle-titre de Lucia di Lammermoor (Donizetti). Elle se produisit ensuite à Toulouse et à Bruxelles et fit ses débuts Lire la suite…, une cantatrice qui a laissé à Paris de charmans souvenirs et qui, par une inspiration sublime, disparut un beau soir de l’Opéra-Comique, il y a de cela une dizaine d’années ; depuis, Mme Charton-DemeurCharton-Demeur, Anne-ArsèneAnne-Arsène Charton-Demeur (Saujon/Charente maritime, 3 mars 1824 – Paris, 30 novembre 1892), mezzosoprano. Elle étudia le chant à Bordeaux, où elle débuta en 1842 dans le rôle-titre de Lucia di Lammermoor (Donizetti). Elle se produisit ensuite à Toulouse et à Bruxelles et fit ses débuts Lire la suite… s’est acquis au Brésil et en Allemagne une très grande et très juste renommée. L’Opéra, ou plutôt M. MeyerbeerMeyerbeer, GiacomoJakob Liebmann Meyer Beer dit Giacomo Meyerbeer (Vogelsdorf, 5 septembre 1791 – Paris, 2 mai 1864), compositeur. Il étudia la composition avec Zelter puis l’abbé Vogler et le piano avec Franz Lauska. Bien que considéré par Moscheles comme un des plus grands pianistes de son temps, Meyerbeer abLire la suite…, cherche partout une femme qui ait une belle voix et qui sache chanter. Mme Charton me paraît réunir ces deux conditions et bien d’autres encore qui devraient attirer sur elle l’attention de notre première scène lyrique et de l’illustre auteur de l’AfricaineAfricaine, L’L’Africaine, opéra en cinq actes sur un livret d’Eugène Scribe mis en musique par Giacomo Meyerbeer et créé posthumément à l’Opéra de Paris le 28 avril 1865.Lire la suite…. La voix de Mme Charton n’a rien perdu de sa fraîcheur d’autrefois, mais elle s’est singulièrement modifiée : les notes graves ont acquis beaucoup d’ampleur et d’étendue ; les sons aigus n’ont pas diminué de volume. Si Mme Charton chante encore de temps en temps certains morceaux de musique légère qui commencèrent sa réputation à l’Opéra-Comique, c’est par pure coquetterie.
Un fait qui aura beaucoup d’importance aux yeux des compositeurs, et dont j’ai été témoin, m’a tout d’abord prévenu en faveur de cette aimable artiste. Nous étions à Carlsruhe, dans l’une des salles du Musée, où avait lieu la répétition du festival. Mme Charton venait de chanter l’air des Noces de FigaroNoces de Figaro, LesLes Noces de Figaro (Le nozze di Figaro), K.V. 492, opera buffa en quatre actes sur un livret en italien de Lorenzo Da Ponte, d’après Beaumarchais, mis en musique par Wolfgang Amadeus Mozart et créé au Burgtheater de Vienne le 1er mai 1786.Lire la suite… annoncé sur le programme, et elle y avait ajouté un agrément de sa façon qui là , plus que partout ailleurs, ne devait pas être à sa place. LitolffLitolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite… s’approche de Mme Charton-DemeurCharton-Demeur, Anne-ArsèneAnne-Arsène Charton-Demeur (Saujon/Charente maritime, 3 mars 1824 – Paris, 30 novembre 1892), mezzosoprano. Elle étudia le chant à Bordeaux, où elle débuta en 1842 dans le rôle-titre de Lucia di Lammermoor (Donizetti). Elle se produisit ensuite à Toulouse et à Bruxelles et fit ses débuts Lire la suite…, et, tout en la complimentant, il lui donne à entendre que la musique de MozartMozart, Wolfgang AmadeusWolfgang Amadeus Mozart (Salzbourg, 27 janvier 1756 – Vienne, 5 décembre 1791), compositeur. Enfant prodige. Son père développa ses dons pour le piano et la composition et l’exhiba dès l’âge de six ans dans des voyages à travers toute l’Europe. Ses premières compositions, des pièces Lire la suite… peut se passer d’embellissemens et de fioritures, surtout en Allemagne. Je connais bien des cantatrices qui auraient peut-être écouté le conseil, mais qui, certainement, ne l’eussent pas suivi ; Mme Charton remercia LitolffLitolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite…, et, le soir du concert, elle ne se permit pas la plus légère altération au texte. Décidément Mme Charton fera bien d’entrer à l’Opéra, car elle ne serait pas digne d’être engagée au Théâtre-Lyrique.
Je reviens à l’andante de Roméo et JulietteRomeo et JulietteRoméo et Juliette, symphonie dramatique, Op. 17, pour solistes, chÅ“ur et orchestre sur un texte d’Emile Deschamps d’après William Shakespeare, composée par Hector Berlioz et créée à la Salle du Conservatoire de Paris le 24 novembre 1839.Lire la suite…, pour exprimer toute l’admiration que m’inspire ce chef-d’œuvre de sentiment et de poésie. Jamais la grande voix de l’orchestre n’a chanté l’amour avec des accens plus tendres et plus passionnés, plus délirans et plus chastes. Comme cela est complètement beau et admirablement gradué, depuis le premier aveu de Juliette, jusqu’à l’instant où les deux amans se séparent ! « Je voudrais ne pas t’avoir donné mon cÅ“ur. – Et pourquoi ? – Pour te le redonner encore… Mon amour pour toi est aussi inépuisable que la mer, plus je t’en donne, et plus il m’en reste : tous les deux sont infinis… » … « Adieu, Juliette, que le sommeil descende sur tes yeux et la paix dans ton cÅ“ur ! Je voudrais être le sommeil et la paix pour reposer comme eux sur tes yeux et sur ton cÅ“ur ! »
Cette page justifierait à elle seule la libéralité de PaganiniPaganini, NicoloNicolo Paganini (Gênes, 27 octobre 1827 – Nice, 27 mai 1840), violoniste et compositeur. Il étudia le violon, la guitare et la composition avec Giovanni Cervetto (Servetto), Giacomo Costa et Francesco Gnecco, puis se perfectionna à Parme avec Alessandro Rolla et Gaspare Ghiretti de 1795 à 1796. Lire la suite… envers l’auteur de Roméo et Juliette Romeo et JulietteRoméo et Juliette, symphonie dramatique, Op. 17, pour solistes, chÅ“ur et orchestre sur un texte d’Emile Deschamps d’après William Shakespeare, composée par Hector Berlioz et créée à la Salle du Conservatoire de Paris le 24 novembre 1839.Lire la suite…; il suffit, pour la comprendre, d’avoir le moindre instinct musical, et on peut l’admirer sans avoir jamais lu ShakespeareShakespeare, WilliamWilliam Shakespeare (Stratford-upon-Avon, baptisé le 26 avril 1564 – Stratford-upon-Avon, 3 mai 1616), auteur dramatique et poète. Il est considéré comme l’un des plus grands écrivains de la littérature anglaise. Il écrivit 37 comédies et tragédies entre 1580 et 1613. Il épousa Anne HathLire la suite…. Quelle femme refuserait de paraître à son balcon si on lui promettait une pareille sérénade ? Dans une scène d’amour c’est toujours le même mot qui revient, prononcé avec des intonations différentes ; dans l’andante de la symphonie de M. Berlioz la même phrase reparaît aussi et on croit toujours l’entendre pour la première fois, tant elle est suave, tant elle est habilement ramenée. « Oh ! que les accens d’une amante sont doux et clairs dans le silence de la nuit ! De quelle musique délicieuse ils remplissent l’oreille ! » Où commencent les transports de Roméo, où s’arrêtent les soupirs de Juliette ? Vous ne vous en apercevez peut-être pas, et assurément ce n’est pas à cela que je vous souhaite de songer.
Je crois que c’est à Prague que M. Hector Berlioz rencontra un musicien ambulant qui lui joua sur la harpe le scherzo de la reine Mab. L’histoire de ce bohémien est tout un roman : M. Berlioz la raconte dans ses Soirées de l’orchestre. Le compositeur et le harpiste cheminèrent quelque temps ensemble : « Quel drôle de morceau ! » disait celui-ci, en parlant du fameux scherzo à l’auteur lui-même. Au concert du Cursaal, il y avait un assez grand nombre de personnes qui partageaient l’opinion du harpiste : drôle de morceau, en effet ; mais souvenez-vous du récit de Mercutio, et vous serez forcé d’avouer que la fantaisie du compositeur n’a pas été plus loin que celle du poëte. Est-ce la faute de M. Berlioz si le public ne sait pas comment est fait le char de la fée des songes, s’il a peu de goût pour les sons harmoniques du violon, et s’il prend le tintement argentin des crotales pour un carillon de sonnettes ? Les couplets qui précèdent le scherzo sont tout à fait dans le même style : assurément cela n’a pas dû plaire aux amateurs de cavatines. Ces couplets, d’une difficulté excessive, ont été parfaitement dits par M. SchnorrSchnorr von Carolsfeld, LudwigLudwig Schnorr von Carolsfeld (Munich, 2 juillet 1836 – Dresde, 21 juillet 1865), ténor. Fils du peintre Julius Schnorr von Carolsfeld, il étudia au conservatoire de Leipzig et débuta à Carlsruhe en 1858. Il fut vite remarqué pour sa belle et puissante voix dans Norma (Bellini), Freischütz (Lire la suite…, ténor du théâtre de Carlsruhe. Les artistes de ce théâtre, ceux de Bade et de Strasbourg composaient l’orchestre et les chÅ“urs, chÅ“urs de Capulets et de Montaigus, auxquels se mêlent, dans la première partie du drame, les bouches de cuivre des trombones et des ophicléides, instrumens guerriers et solennels.
Je n’analyse pas la symphonie de M. Hector Berlioz : je cite quelques détails au courant de la plume. Pendant l’exécution, j’ai vu des gens enthousiasmés ; j’en ai vu qui haussaient les épaules. D’un côté comme de l’autre, c’est de la passion. Heureux le compositeur qui peut passionner la foule ! Parmi les confrères de M. Berlioz, il y en a beaucoup qu’il a traités et qu’il traite encore avec sévérité, avec dédain. Eh bien ! ceux-là , eux-mêmes, ne sauraient le traiter avec indifférence. Franchement, M. Berlioz, bien qu’il n’aime pas exclusivement que sa musique, ne peut pas aimer la musique de tout le monde. Au moment où les cors chantaient le magnifique adagio du concerto de M. LitolffLitolff, HenriHenry Charles Litolff (Londres, 6 février 1818 – Bois-Colombes, 6 août 1891), pianiste et compositeur. Après des études de piano avec Ignaz Moscheles entre 1830 et 1835, il voyagea en Europe (Paris, Bruxelles, Varsovie, Dresde, Leipzig et Berlin). En 1849, il devint citoyen de Brunswick et épLire la suite…, l’auteur de Roméo et JulietteRomeo et JulietteRoméo et Juliette, symphonie dramatique, Op. 17, pour solistes, chÅ“ur et orchestre sur un texte d’Emile Deschamps d’après William Shakespeare, composée par Hector Berlioz et créée à la Salle du Conservatoire de Paris le 24 novembre 1839.Lire la suite… s’est penché sur le célèbre pianiste, et lui a dit tout bas : « C’est très beau, cela ! » J’ai donc raison d’affirmer que M. Berlioz n’aime pas exclusivement que sa musique ! Mais, en Allemagne comme en France, il y a des fanatiques qui ne lui pardonneront jamais d’avoir osé discuter MozartMozart, Wolfgang AmadeusWolfgang Amadeus Mozart (Salzbourg, 27 janvier 1756 – Vienne, 5 décembre 1791), compositeur. Enfant prodige. Son père développa ses dons pour le piano et la composition et l’exhiba dès l’âge de six ans dans des voyages à travers toute l’Europe. Ses premières compositions, des pièces Lire la suite…, HaydnHaydn, Franz JosefFranz Josef Haydn (Rohrau/Basse Autriche, 31 mars 1732 – Vienne, 31 mai 1809), compositeur. Il étudia avec Johann Mathias Franck, chef de chÅ“ur de l’église de Hainburg et fut remarqué par Reutter, maître de chapelle du Stephansdom à Vienne, qu’il le recruta en 1739 ou 1740 comme choristeLire la suite…, Sébastien BachBach, Jean-SebastienJohann Sebastian Bach (Eisenach, 21 mars 1685 – Leipzig, 28 juillet 1750), organiste et compositeur. Il fut nommé organiste à la Neue Kirche d’Arnstadt de 1703 à 1707. Ses premières Å“uvres pour orgue datent de cette époque. Il devint organiste à la Blasiuskirche de Mulhausen en 1707 et éLire la suite…, et qui se souviennent de l’esprit, de la verve, du mordant que le feuilletoniste des Débats mettait dans ces sortes de discussions. Cela n’empêche pas M. Berlioz d’être très bien accueilli en Allemagne ; seulement, quand il n’est pas là pour diriger l’exécution de ses Å“uvres, on s’abstient de les exécuter.
La recette du concert s’est élevée à huit mille francs, et les frais auraient absorbé la recette si M. Benazet ne les avait pris à sa charge. Voilà comment on entend la bienfaisance de l’autre côté du Rhin.
J’allais oublier mon ami VivierVivier, Eugène-LéonEugène-Léon Vivier (Brioude, 4 décembre 1817 – Nice, 24 février 1900), corniste et compositeur. Il abandonna le droit pour se consacrer au cor, qu’il apprit en autodidacte. En 1842, il s’installa à Paris et se produisit en concerts dans sa ville et à l’étranger, souvent aux cotés de Lire la suite…. Il a si peu joué ! Un adagio de quelques mesures, des sons filés, des portamenti, des notes profondes, des accords de trois sons, beaucoup de justesse et de sentiment : il n’en a pas fallu davantage pour que la salle entière donnât au grand virtuose des marques de la plus vive admiration. Je regrette d’être parti de Bade sans avoir assisté aux courses, aux chasses et à la représentation d’une comédie de MéryMéry, Francois-Joseph-Pierre-AndréFrançois-Joseph-Pierre-André Méry (Les Aygalades près de Marseille, 21 janvier 1798 – Paris, 17 juin 1866), écrivain. Il étudia le droit à Aix-en-Provence avant de fonder le périodique Le Phocéen en 1820 et plus tard La Méditerranée. En 1824, il vint à Paris et collabora au journal Le Lire la suite…, donnée sur le théâtre de la Conversation au profit des incendiés de Waldorf, petit village près d’Heidelberg. Cette soirée a produit six mille francs, les frais étant toujours à la charge de M. BénazetBénazet, Oscar EdouardOscar-Edouard Bénazet (Bordeaux, 30 mai 1801 – Nice, 2 décembre 1867), directeur de casino et entrepreneur. Fils de Jacques Bénazet qui était, à Paris, partenaire d’une dizaine de maisons de jeux, dont Le Casino de Paris jusqu’en 1837 quand les maisons de jeu furent interdites. Ayant étudiLire la suite…. Le lendemain de mon départ de Bade, j’étais à Blois : à mon arrivée les fêtes étaient terminées, les chandelles étaient éteintes, mais non point les fusées et les feux de joie.
J’ai assisté à la pendaison de la crémaillère dans le ravissant castel de M. de VillemessantVillemessant, Jean-Hippolyte deJean-Hippolyte de Villemessant (Rouen, 22 avril 1810 – Monte-Carlo, 2 avril 1879), journaliste. Il s’installa à Paris, où il lança La Sylphide, un hebdomadaire de mode, de littérature, de théâtre et de musique, qui disparut en 1844. Après d’autre essais infructueux, il ressuscita Le FigLire la suite…, et je me suis trouvé mêlé à une foule d’artistes distingués et de gens aimables qui conserveront sans doute, comme moi, le meilleur souvenir de cette charmante journée. C’est là que le terrible JouvinJouvin, Jean-Baptiste-François dit BenoitJean-Baptiste-François dit Benoit Jouvin (Grenoble, 21 janvier 1810 – Château de Bois-Préau à Rueil, 14 novembre 1886), journaliste et critique musical et dramatique. Après ses études scolaires à Grenoble, il se rendit à Paris pour y suivre des études de droit. Pour gagner sa vie il devinLire la suite… a dû ôter ses gants, pour nous montrer à tous ses longs doigts effilés, ornés de griffes. Et malgré cela il n’est pas un artiste présent à la fête qui n’ait tenu à honneur de serrer la main du loyal critique. DuprezDuprez, Gilbert-LouisGilbert-Louis Duprez (Paris, 6 décembre 1806 – Poissy, 23 septembre 1896), ténor. Il se fit d’abord une carrière en Italie où il créa plusieurs rôles d’opéras de Donizetti. Ce dernier écrivit le rôle d’Edgardo de Lucia di Lammermoor pour Duprez qui le créa à Naples en 1835. En 183Lire la suite…, FaureFaure, Jean-BaptisteJean-Baptiste Faure (Moulins, 15 janvier 1830 – Paris, 9 novembre 1914), baryton. Elève de Ponchard au Conservatoire de Paris, il obtint les 1er Prix de chant et d’opéra-comique à l’unanimité en 1852 et débuta en octobre à l’Opéra-Comique dans le rôle de Pygmalion (Massé). A l’OpÃLire la suite…, Mlle WertheimberWertheimber, PalmyrePalmyre Wertheimber (Paris, 9 septembre 1832 – Paris, 9 mai 1917), contralto. Elle étudia au Conservatoire de Parie où elle obtint les 1er Prix de chant et d’opéra et d’opéra-comique en 1851. Elle débuta à l’Opéra-Comique en 1852 participant cette année aux créations du Carillonneur dLire la suite… et Mme Meillet étaient encore tout émus et tout radieux du brillant succès que leur avait valu le concert de la veille.
Personnes discutées
Personnes citées
Oeuvres discutées
Oeuvres citées
Notes d'édition
Pour ajouter à l’attrait de son casino, son directeur Jacques Bénazet, qui en avait obtenu la licence d’exploitation en 1838, décida six ans plus tard de donner un concert-festival chaque année au mois d’août, au plus haut de la saison des cures d’eau. Il invita en premier lieu Hector Berlioz, qui ne put s’y rendre en 1844 pour des raisons de santé. En 1848, Jacques Bénazet décède et ce fut son fils Édouard qui lui succéda. Ce dernier invita de nouveau Hector Berlioz, qui y donna son premier concert-festival le 11 août 1853. Berlioz revint diriger le concert-festival en 1856 et les années suivantes, jusqu’en 1863. En 1864, le concert-festival fut annulé et en 1865, c’est Ernest Reyer qui le dirigea.
Le concert eut lieu le 27 août 1858.
C’est probablement l’ouverture Leonore no. 2 que Berlioz dirigea à Bade.
Ayant assisté au concert dirigé par Berlioz le 16 décembre 1838, où la Symphonie fantastique et Harold en Italie furent joués, Nicolo Paganini envoya un mot à Berlioz deux jours plus tard, disant : « Beethoven étant mort, il n’y a que Berlioz qui puisse le faire revivre » ; il joignit vingt mille francs à cette note en hommage au compositeur.
Le Messager des Théâtres et des Arts du 29 août 1858 annonce cette comédie en ces termes : « On annonce à Bade pour le 1er septembre une comédie de Méry, composée ad hoc et jouée par des acteurs de salon. On cite Mme la princesse de Labanoff, M. de Rumbold comme chargés des principaux rôles. M. Méry doit jouer aussi dans son œuvre. »
Le 23 juillet 1858, un incendie se déclara à Walldorf qui, en deux heures de temps, détruisit 58 maisons et 122 dépendances. Un enfant de quinze mois périt dans les flammes et 264 personnes se retrouvèrent sans abri.