L’Athenæum français, 3 mai 1856, p. 375-376 (article signé E. Reyer).

Chronique musicale.

Théâtre-Lyrique : Le Chapeau du roiChapeau du roi, LeLe Chapeau du Roi opéra-comique en trois actes sur un livret d’Edouard Fournier mis en musique par Henri Caspers et créé au Théâtre-Lyrique le 16 avril 1856.Lire la suite…, opéra-comique en un acte, paroles de M. Edouard FournierFournier, EdouardÉdouard Fournier (Orléans, 15 juin 1819 – Paris, 10 mai 1880), auteur dramatique, librettiste et historien. Il fut l’auteur de nombreuses pièces de théâtre, dont La Fête des fous (1841) et Christian et Marguerite (1851). Le Chapeau du roi fut son premier livret. Il écrivit de pLire la suite…, musique de M. Henri Caspers.


Il s’agit dans ce petit acte du chapeau de Louis XILouis XI de ValoisLouis XI (Bourges, 3 juillet 1423 – Château de Plessis-lez-Tours 30 août 1483), roi de France. Fils de Charles VII et de Marie d’Anjou, il régna à partir de 1461. Il combattit Charles le Téméraire, duc de Bourgogne qu’il vainquit en 1477 après avoir dénoué l’alliance de la BourgogneLire la suite…. Quoi que puisse dire l’histoire sur le caractère de ce monarque, sa mémoire doit être vénérée par les musiciens ; il améliora la position des chantres de sa chapelle et augmenta leur salaire qui s’éleva à 120 livres tournois, soit 704 francs 40 centimes de notre monnaie ; je suppose que les émoluments de Jean OckeghemOckeghem, Jean deJean de Ockeghem (Saint-Ghislain près de Mons, vers 1410 – Tours ?, 6 février 1494), compositeur. Chantre à l’église Notre-Dame d’Anvers (1443-1444) puis à la chapelle de Charles de Bourbon à Moulins (1446-1448), il fut engagé à la chapelle des rois de France, où il passa le reste deLire la suite…, son premier chapelain, qui occupa également la charge de trésorier de l’église Saint-Martin de Tours, étaient un peu plus considérables. C’est à Jean OckeghemOckeghem, Jean deJean de Ockeghem (Saint-Ghislain près de Mons, vers 1410 – Tours ?, 6 février 1494), compositeur. Chantre à l’église Notre-Dame d’Anvers (1443-1444) puis à la chapelle de Charles de Bourbon à Moulins (1446-1448), il fut engagé à la chapelle des rois de France, où il passa le reste deLire la suite…, né à Bavay en 1440, que l’on attribue l’invention du canon, et voici en quels termes l’historien GlaréanLoriti, HeinrichHeinrich Loriti, dit Glaréan (Mollis/ Suisse, ? juin 1488 – Fribourg-en-Brisgau 27 [28 ?] mars 1563), historien. Il fut à la fois musicien, théoricien de la musique, poète, philologue, historien, mathématicien et géographe. Il étudia tour à tour à Berne, à Vienne puis à Cologne, où iLire la suite… s’exprime sur ce compositeur : « La renommée d’OckeghemOckeghem, Jean deJean de Ockeghem (Saint-Ghislain près de Mons, vers 1410 – Tours ?, 6 février 1494), compositeur. Chantre à l’église Notre-Dame d’Anvers (1443-1444) puis à la chapelle de Charles de Bourbon à Moulins (1446-1448), il fut engagé à la chapelle des rois de France, où il passa le reste deLire la suite… fut une des plus belles de l’époque où il vécut. Tous les auteurs contemporains parlent de lui avec admiration, et Didier Lupi [Johannes Lupi]Lupi, JohannesJohannes Lupi (?, vers 1506 – Cambrai, 20 décembre 1539), compositeur. Chantre à la cathédrale Notre-Dame de Cambrai de 1514 à 1521, il fut envoyé étudier la philosophie à l’université de Louvain. De retour à Cambrai, il fut nommé maître des enfants de chœurs en 1527. On lui attribueLire la suite… a intitulé la complainte en musique qu’il a composée sur sa mort : Naenia in Joannem OkegiNaenia in Joanem Okegi, musicorum principemNaenia in Joanem Okegi, musicorum principem, poème d’Erasme de Rotterdam sur la mort d’Ockeghem dont l’incipit est : Ergone conticuit. Ce motet fut publié par Susato en 1547 comme une œuvre de Johannes Lupi, chantre puis maitre des enfants de chœur de la cathédrale Notre-Dame de Cambrai.Lire la suite…, musicorum principemNaenia in Joanem Okegi, musicorum principemNaenia in Joanem Okegi, musicorum principem, poème d’Erasme de Rotterdam sur la mort d’Ockeghem dont l’incipit est : Ergone conticuit. Ce motet fut publié par Susato en 1547 comme une œuvre de Johannes Lupi, chantre puis maitre des enfants de chœur de la cathédrale Notre-Dame de Cambrai.Lire la suite…. Cette renommée fut méritée par plusieurs inventions importantes, et notamment par celle du canon dont il fut l’auteur. » C’est de Jean OckeghemOckeghem, Jean deJean de Ockeghem (Saint-Ghislain près de Mons, vers 1410 – Tours ?, 6 février 1494), compositeur. Chantre à l’église Notre-Dame d’Anvers (1443-1444) puis à la chapelle de Charles de Bourbon à Moulins (1446-1448), il fut engagé à la chapelle des rois de France, où il passa le reste deLire la suite… que le célèbre Josquin des Prés reçut ses premières leçons. Louis XILouis XI de ValoisLouis XI (Bourges, 3 juillet 1423 – Château de Plessis-lez-Tours 30 août 1483), roi de France. Fils de Charles VII et de Marie d’Anjou, il régna à partir de 1461. Il combattit Charles le Téméraire, duc de Bourgogne qu’il vainquit en 1477 après avoir dénoué l’alliance de la BourgogneLire la suite… attacha à son oratoire cinq chapelains nouveaux qui y furent admis pour dire chaque jour la messe de la Sainte-Croix, de la Nativité, de saint Claude, de saint Martin et de saint Hubert ; il affectionnait également les grandes processions extérieures, et la chapelle royale devait y figurer convenablement et par la tenue de ses musiciens et par l’ensemble et l’effet de ses chants. Le bon exemple donné par le souverain était imité par les princes et princesses de sa famille. La plupart d’entre eux ne se contentaient pas d’avoir à leur service un certain nombre de musiciens destinés à jouer et à chanter dans les fêtes qui animaient leur cour, mais ils avaient aussi leur chapelle musicale organisée sur un pied très-respectable. La chapelle de Charlotte de Savoie, femme de Louis XILouis XI de ValoisLouis XI (Bourges, 3 juillet 1423 – Château de Plessis-lez-Tours 30 août 1483), roi de France. Fils de Charles VII et de Marie d’Anjou, il régna à partir de 1461. Il combattit Charles le Téméraire, duc de Bourgogne qu’il vainquit en 1477 après avoir dénoué l’alliance de la BourgogneLire la suite…, et celle de Jean d’Orléans, se faisaient surtout remarquer par l’excellente composition de leur personnel et par l’éclat qui en jaillissait dans les solennités religieuses. Charles VICharles VIIICharles VIII (château d’Amboise, 30 juin 1470 – château d’Amboise, 7 avril 1498), roi de France. Fils de Louis XI, il régna de 1483 à 1498.Lire la suite… [Charles VIII]Charles VIIICharles VIII (château d’Amboise, 30 juin 1470 – château d’Amboise, 7 avril 1498), roi de France. Fils de Louis XI, il régna de 1483 à 1498.Lire la suite…, ainsi que cela résulte d’une ordonnance relative à son hôtel, datée du mois de février 1585 [1485 ?], fixa à neuf le nombre de ses ménestrels : « Six hauts et trois bas (qualification qui s’appliqua dans le principe aux joueurs de viole, et qui servit plus tard à désigner les exécutants des pièces à plusieurs parties, lesquels prirent le nom de dessus, de haute-contre, de taille et de basse de haut-bois) ; lesdits ménestrels avaient : foing et avoine pour dix et quatre chevaux, et chacun onze deniers par jour pour hottelage (logement) ; un cahierEclair, L’L’Eclair, drame lyrique en trois actes sur un livret de Henri de Saint-Georges et d’Eugène de Planard mis en musique par Fromental Halévy et créé à l’Opéra-Comique le 30 décembre 1830.Lire la suite… de chandelle, demi-moufle de bûches pour tous, et chacun pinte de vin de coucher, et chacun un vallet mangeant en salle. » Sous Louis XI, aucun ménestrel ne paraît dans les comptes des dépenses de la cour ; peut-être ces musiciens n’y étaient-ils admis que passagèrement. En somme, même en supposant qu’il entrât plus de superstition religieuse que de véritable amour de l’art dans la protection et les libéralités accordées par le monarque aux musiciens de sa cour (chantres ou ménestrels, peu importe), il est juste de constater ce fait : que sous son règne la musique était très-florissante, que les artistes étaient, de la part du roi, l’objet d’une certaine considération, et en général très-convenablement traités. Cela n’empêcha pas Louis XILouis XI de ValoisLouis XI (Bourges, 3 juillet 1423 – Château de Plessis-lez-Tours 30 août 1483), roi de France. Fils de Charles VII et de Marie d’Anjou, il régna à partir de 1461. Il combattit Charles le Téméraire, duc de Bourgogne qu’il vainquit en 1477 après avoir dénoué l’alliance de la BourgogneLire la suite… d’être un profond politique.

Maintenant nous ferions peut-être bien de revenir au libretto de M. Éd. FournierFournier, EdouardÉdouard Fournier (Orléans, 15 juin 1819 – Paris, 10 mai 1880), auteur dramatique, librettiste et historien. Il fut l’auteur de nombreuses pièces de théâtre, dont La Fête des fous (1841) et Christian et Marguerite (1851). Le Chapeau du roi fut son premier livret. Il écrivit de pLire la suite… et au chapeau guirlandé de figurines de plomb avec lequel Louis XILouis XI de ValoisLouis XI (Bourges, 3 juillet 1423 – Château de Plessis-lez-Tours 30 août 1483), roi de France. Fils de Charles VII et de Marie d’Anjou, il régna à partir de 1461. Il combattit Charles le Téméraire, duc de Bourgogne qu’il vainquit en 1477 après avoir dénoué l’alliance de la BourgogneLire la suite… a récompensé maître Landry, l’habile forgeron qui a confectionné la cage du cardinal de la Balue et les barreaux des fenêtres du château de Plessis-les-Tours. Maître Landry ne comprend pas très-bien la valeur du cadeau royal ; le page Loys, plus malin que lui, propose au forgeron de le jouer aux dés contre vingt-cinq écus, et le gagne. Il découvre, caché dans l’intérieur du chapeau, un brevet de capitaine des chiens de Sa Majesté : ce brevet revient de droit à maître Landry, qui étouffe de joie et d’orgueil ; le voilà devenu un personnage, et comme il ne veut pas de mésalliance, il retire le consentement qu’il venait de donner au mariage de sa fille Jeanne avec le ménestrel Olivier. Loys, l’ami d’Olivier, a gardé le chapeau, sachant bien qu’un jour ou l’autre le roi ne manquera pas de le redemander, et, pour que cela arrive un peu plus tôt, il se prend de querelle avec maître Landry, fait un tapage effroyable et attire la garde de nuit, qui les mène tous les deux dans la prison du château. Pendant que son compagnon est en train de se lamenter sous les verrous, Loys s’esquive et s’en va faire le revenant dans les sombres galeries qui avoisinent l’appartement du monarque. Louis XILouis XI de ValoisLouis XI (Bourges, 3 juillet 1423 – Château de Plessis-lez-Tours 30 août 1483), roi de France. Fils de Charles VII et de Marie d’Anjou, il régna à partir de 1461. Il combattit Charles le Téméraire, duc de Bourgogne qu’il vainquit en 1477 après avoir dénoué l’alliance de la BourgogneLire la suite…, repris de ses terreurs habituelles, veut, pour conjurer l’apparition, s’agenouiller devant les amulettes de son couvre-chef. Loys rend le chapeau et obtient facilement du roi qu’il signera au contrat de Jeannette et d’Olivier ; maître Landry, dont les velléités orgueilleuses se sont un peu calmées à l’humidité du cachot, ne met plus d’obstacle à l’union des deux amants.

Ce libretto, écrit par un homme d’esprit, est agréablement tourné et il a réussi. M. CaspersCaspers, Louis-Henri-JeanLouis-Henri-Jean Caspers (Paris, 2 octobre 1825 – Paris, 19 décembre 1861), compositeur. Il étudia au Conservatoire de Paris et obtint un premier prix d’harmonie en 1847 et un deuxième prix de contrepoint et fugue en 1849. Il fut le chef d’orchestre des cirques Napoléon et de l’ImpératrLire la suite… est élève de M. HalévyHalévy, Jacques-Fromental-ÉlieJacques-Fromental-Élie Halévy (Paris, 27 mai 1799 – Nice, 12 mars 1862), compositeur. Il étudia la composition au Conservatoire de Paris avec Cherubini et Méhul et obtint le Prix de Rome en 1819. Il débuta avec succès à l’Opéra-comique en 1827 avec L’Artisan et produisit à ce théâtrLire la suite…, et son œuvre est celle d’un musicien qui a été à bonne école ; on y sent encore un peu trop l’influence du maître, attestée çà et là par quelques réminiscences, par des tournures mélodiques, par de certaines formules qui appartiennent en propre à l’auteur de la JuiveJuive, LaLa Juive, opéra en cinq actes sur un livret d’Eugène Scribe mis en musique par Fromental Halévy et créé à l’Opéra de Paris le 23 février 1835.Lire la suite… et de l’Éclair ; mais cette influence disparaît tôt ou tard, à mesure que l’individualité du compositeur se dégage. M. CaspersCaspers, Louis-Henri-JeanLouis-Henri-Jean Caspers (Paris, 2 octobre 1825 – Paris, 19 décembre 1861), compositeur. Il étudia au Conservatoire de Paris et obtint un premier prix d’harmonie en 1847 et un deuxième prix de contrepoint et fugue en 1849. Il fut le chef d’orchestre des cirques Napoléon et de l’ImpératrLire la suite… est encore jeune, et comme il sait son métier, l’imagination aidant, nul doute qu’il n’ait devant lui un brillant avenir. Olivier chante de jolis couplets dont l’accompagnement fait par la harpe, la flûte et le violoncelle est d’un effet charmant ; la chanson de maître Landry a beaucoup d’entrain ; j’aime moins l’air de Jeanne :

Mon Dieu, qu’un gentil page

Est heureux et chéri.

La scène des dés est parfaitement traitée ; la marche de la ronde de nuit ne manque pas de caractère ; elle finit smorzando, et un coryphée chante à mezza voce dans la coulisse :

Sentinelle, prenez garde à vous.

Tout cela est habilement orchestré ; les chœurs sont vigoureusement écrits, les voix bien agencées : en un mot, c’est l’œuvre d’un débutant qui fait de belles promesses et qui les tiendra. MeilletMeillet, Auguste Alphonse EdmondAuguste-Alphonse-Edmond Meillet (Nevers, 7 avril 1828 – Veules/ Seine-Inférieure, 31 août 1871), baryton. Il étudia au Conservatoire de Paris, et fut engagé à l’Opéra de 1848 à 1851. Il fut dans la troupe du Théâtre-Lyrique de 1851 à 1861 sauf pour la saison 1852/53 où il chanta à l’OpLire la suite… joue avec rondeur le personnage de maître Landry ; il s’y montre ce qu’il est ordinairement, bon chanteur et bon comédien ; Mlle GarnierGarnier, MarieMarie Garnier (? – ?), contralto. Engagée au Théâtre-Lyrique en 1852, elle participa aux créations de Si j’étais roi (Adam, 1852), Le Roi des Halles (Adam, 1853) et Colin-Maillard (Hignard, 1853). Elle créa le rôle-titre de Rose et Narcisse (Barbier, 1855) puis quitta le Théâtre-Lyrique pLire la suite… chante faux d’une manière désespérante, et ce qu’il y a de pis, c’est qu’elle ne chantera jamais juste. M. AdamAdam, Adolphe-CharlesAdolphe-Charles Adam (Paris, 24 juillet 1803 – Paris, 3 mai 1856), compositeur. Il étudia au Conservatoire de Paris et n’eut qu’un 2eme Prix de Rome en 1825. Il eut se premiers succès au Vaudeville en 1825 et au Gymnase (L’Oncle d’Amerique). Il fut joué à l’Opéra-comique pour la première foiLire la suite…, qui a l’oreille très-délicate, doit être de mon avis.

Théodore RitterRitter, ThéodoreToussaint Prévost [Prévost-Ritter], dit Théodore Ritter (Nantes, 5 avril 1840 – Paris, 6 avril 1886), pianiste et compositeur. Il fut l’unique élève de Berlioz, qui lui confia la réduction pour piano de L’Enfance du Christ et de Romeo et Juliette. Il excellait dans l’interprétation deLire la suite… vient de partir pour l’Allemagne emportant avec lui une ouverture à grand orchestre qui est son premier essai dans le genre symphonique, sa première œuvre sérieuse. J’ai eu le manuscrit entre les mains, et je crois que sous le rapport mélodique aussi bien que sous le rapport de l’instrumentation, très-claire et très-variée, cette œuvre fera le plus grand honneur au jeune maestro. J’y ai remarqué surtout d’heureux efforts pour sortir des sentiers battus et s’affranchir de la forme traditionnelle, beaucoup de soin dans le travail du quatuor, et, dans la combinaison des instruments, une grande intelligence des différents timbres.