ARTICLE DU JOURNAL DES DÉBATS

DU 16 JUILLET 1871, p. 3

On a fait à M. Auber des funérailles dignes de lui. Il convient de le dire aux ordonnateurs de cette belle et touchante cérémonie. A midi précis, la foule des invités remplissant déjà la grande nef de l’église, les tribunes et les bas-côtés, M. Georges Hainl a levé son bâton de commandement, et l’exécution du RequiemRequiem en do mineurRequiem en do mineur pour chœur à quatre voix (S, A, T, B) et orchestre de Luigi Cherubini. L’œuvre fut créée le 21 janvier 1817 à l’église Saint-Denis de Paris pour l’anniversaire de la mort de Louis XVI.Lire la suite… de Cherubini a commencé. Le Dies irae, une des pages sublimes de l’œuvre, a produit sur l’au­ditoire une profonde impression. A la place de l’Offertoire, l’orchestre, c’est-à-dire la So­ciété des Concerts du Conservatoire, a exé­cuté l’andante de la symphonie en ut mineur de Beethoven. Puis M. Bouhy, baryton de l’Opéra, dont on attend toujours les débuts, a chanté un BenedictusBenedictus en do majeur no. 5Benedictus en do majeur no. 5 pour baryton, clarinette, harpe et orgue de Daniel-François-Esprit Auber.Lire la suite… de M. Auber. Le caractère de ce morceau est plus dramatique que religieux, et chacun s’en serait aperçu quand bien même M. Bouhy n’aurait pas pris soin de le faire re­marquer. Un Agnus deiAgnus Dei en la bémol majeur, S. 102Agnus Dei en la bémol majeur, S. 102, pour deux sopranos, orgue et harpe de Daniel-François-Esprit Auber.Lire la suite… du maître illustre et regretté a été dit avec plus d’émotion que d’onction par Mlles Bloch et Priolat ; l’orchestre et les voix ont exécuté immédiatement après un autre Agnus DeiAgnus Dei en la bémol majeur, S. 102Agnus Dei en la bémol majeur, S. 102, pour deux sopranos, orgue et harpe de Daniel-François-Esprit Auber.Lire la suite…, celui-là de Cherubini. C’était la fin du RequiemRequiem en do mineurRequiem en do mineur pour chœur à quatre voix (S, A, T, B) et orchestre de Luigi Cherubini. L’œuvre fut créée le 21 janvier 1817 à l’église Saint-Denis de Paris pour l’anniversaire de la mort de Louis XVI.Lire la suite… et la fin de la céré­monie religieuse.

De l’église de la Trinité un grand nombre de personnes ont accompagné le corps au cime­tière Montmartre. On a fait passer le cortège devant l’Opéra et l’Opéra-Comique, et il a suivi la rue Auber, la rue du Havre et la rue d’Amsterdam jusqu’au boulevard extérieur. Pendant le trajet, la musique du 3e régiment du génie, venue tout exprès d’Arras sur l’ordre du ministre de la guerre, a exécuté plusieurs morceaux d’un caractère funèbre et dont au­cun, croyons-nous, n’était emprunté au réper­toire de l’illustre défunt. Cette musique du 3e régiment du génie est excellente : elle rem­plaçait la musique de la garde de Paris qui donne dans ce moment-ci des concerts à Lon­dres.

Au cimetière, après le De Profundis chanté par la maîtrise de l’église de la Trinité, cinquante jeunes orphéonistes, réunis aux choristes de l’Opéra et à d’autres choristes, ont exécuté la Prière de la MuetteMuette de Portici, LaLa Muette de Portici, opéra en cinq actes sur un livret d’Eugène Scribe et Germain Delavigne mis en musique par Daniel-François-Esprit Auber et créé à l’Opéra de Paris le 29 février 1828.Lire la suite… avec des oppositions de nuances un peu trop accusées peut-être.

Sept discours ont été prononcés sur la tombe de M. Auber par le ministre des beaux-arts, M. Jules Simon ; par M. Beulé, au nom de l’Institut ; par M. Ambroise Thomas, directeur du Conservatoire ; par M. Alexandre Dumas, président de la Société des auteurs et compo­siteurs de musique ; par M. le baron Taylor, président de l’Association des artistes drama­tiques ; par M. Emile Perrin, qui peut encore parler au nom de l’Opéra, et par M. de Leuven, qui n’a pas voulu céder à M. du Locle l’honneur de porter la parole au nom de l’Opéra-Comique.

Après le septième discours, la foule s’est écoulée recueillie et silencieuse.                             E. R