FEUILLETON DU JOURNAL DES DÉBATS
DU 17 FÉVRIER 1872.
Le Caire, le 3 février 1872.
Mon cher Directeur,
Je reviens de la Haute-Egypte, ivre de soleil, aveuglé de poussière et rassasié d’hiéroglyphes. Depuis Boulaq, où l’on s’embarque, jusqu’à PhilÅ“, qui est le terme du voyage, j’ai vu des villages bâtis avec du limon, et des raffineries de sucre dont les tuyaux de fonte et les hautes chemiÂnées s’élancent dans l’air comme des miÂnarets ; j’ai vu les verts palmiers et les sycomores au feuillage sombre se refléÂter dans l’eau transparente du fleuve ; j’ai entendu grincer les sakiehs et vu manÂÅ“uvrer les chadoufs par des fellahs tout nus, à peu de chose près. — Heureux les peuples qui n’ont pas, besoin de se vêtir ! Et cependant, à l’air triste et résigné de ces fellahs, on serait tenté de croire qu’ils ne comprennent pas leur bonheur. — J’ai vu des palais et des temples ensevelis sous de misérables huttes, j’ai marché dans les galeries humides où sont les tombeaux des prêtres et les tombeaux des rois, je suis entré dans les hypogées, dans les grottes, dans les spéos, je suis desÂcendu dans les cryptes, j’ai senti sur ma figure des battemens d’ailes de chauves-souris, j’ai vu des couchers de soleil splendides, des femmes voilées et des femmes sans voiles, des danseuses jaunes à Kéneh et des danseuses noires à Assouan, des sphynx et des obélisques ; des derviches qui agitaient leur sonnette et des moines coptes qui nageaient pour venir nous demander des bakhchich, j’ai vu des grues et des ibis, des gypaètes et des héÂrons ; mais je n’ai pas vu de crocodiles.
Notre voyage a duré vingt-deux jours, et nous étions vingt-deux passagers à bord du Saïda ; l’équipage se composait d’une dizaine de matelots, chauffeurs et mécaniÂciens, d’un docteur égyptien, d’un drogman grec, du pilote, du capitaine (un nègre du Soudan) et d’un singe, parent du capitaine.
Le drogman, à lui seul, mériterait une description particulière. Je le vois encore, je le verrai toujours avec sa couffieh autour de la tête, son fouet à la main et ses grandes bottes à l’écuyère. Il se nomme Timoléon BocoupoliBeaucoupoli, TimoléonTimoléon Bocoupoli ( ? – ?), guide et traducteur. Dragoman, c’est-à -dire à la fois guide et traducteur pour la compagnie de voyage Thomas Cook & Son de Londres, il était basé à l’hôtel Bellevue de Beyrouth (Syrie, aujourd’hui Liban) et accompagnait les clients des voyages organisÃLire la suite… ; les Anglais (car il y avait des Anglais à bord) l’appelaient mister CaméÂléon, et les Arabes Napoléon tout simpleÂment.
Timoléon m’avait pris en amitié et me faisait ses confidences. Une jeune gouverÂnante anglaise qu’il avait détournée de ses devoirs et qui l’attendait à Beyrouth lui causait beaucoup de tourment. Pour être drogman, il n’est pas nécessaire d’être phiÂlosophe. Timoléon est un type ; deux de ses cousins sont partis au commencement de la guerre et ne sont pas revenus. TimoÂléon a juré de les venger : « Au premier signal, m’a-t-il dit, j’arrive à Paris à la tête d’une compagnie d’Albanais. » Et il le fera comme il le dit, car Timoléon est brave et a pour les Français une affection toute particulière. Aussi ai-je été le premier à lui signer un certificat qui témoigne de son intelligence, de son zèle et de sa proÂbité. Que ceux qui iront en Palestine se souviennent de Timoléon. Timoléon ne veut plus naviguer sur le Nil ; il va mainteÂnant servir de guide aux touristes qui font le voyage de Jérusalem.
Les ruines de Karnak, par un beau clair de lune, sont d’un aspect féerique ; le temÂple d’Edfou est admirablement conservé, et du haut de ses pylônes on jouit d’un panoÂrama magnifique ; la vallée des tombeaux est une des plus belles horreurs qui se puissent voir ; je me suis reposé avec délices sous les frais ombrages de l’île d’Eléphantine ; j’ai admiré la grâce voluptueuse des danseuses nubiennes ; j’ai écouté avec ravisÂsement, le soir, cette note plaintive et douce, un peu nasillarde peut-être, que les pâtres tirent de leur chalumeau ; j’ai traversé une partie du désert pendant que le Khamsin soufflait ; j’ai eu de la pluie (et quelle pluie !) à Assouan, là où l’Egypte finit et où la Nubie commence ; j’ai vu passer sur d’élégans dahabiehs de jeunes misses qui lisaient le guide de Murray ; je me suis senti écrasé, anéanti par l’imposante grandeur du temple de Denderah ; l’île de PhilÅ“, avec ses longues colonnades, ses vastes portiques et ses hauts pylônes, m’a viveÂment impressionné, et je ne me lassais pas de contempler la magnificence des paysaÂges qui l’environnent. Mais le plus charÂmant souvenir que me laissera mon voyage dans la Haute-Egypte, c’est la visite que j’ai faite aux ruines d’Abydos, parce que j’y suis allé seul. Du moins je n’avais avec moi que mes deux compagnons ordinaires, qui ne m’ont jamais quitté pendant toute la durée de mon voyage, deux compagnons qui m’ont expliqué de la façon la plus claire et avec la science la plus aimable tout ce que je voyais, l’un aimant les descriptions poéÂtiques, l’autre familier comme personne avec les monumens et les souvenirs des anciennes dynasties : le livre de M. Maxime Du CampDu Camp, MaximeMaxime Du Camp (Paris, 8 février 1822 – Baden-Baden/Allemagne, 8 février 1894), écrivain et photographe. Issu d’une famille aisée, son père Theodore Du Camp était un célèbre médecin urologue, il put, après ses études, faire des voyages. De 1844 à 1845, il visita Smyrne, Ephèse, ConsLire la suite… et celui que M. Mariette-Bey écrit tout exprès pour les invités du khédive, lors de l’inauguration du canal de Suez.
De Billianeh à Abydos le chemin est raÂvissant : après avoir traversé un petit bois de palmiers on entre dans des champs de fèves, dans des prairies d’un vert d’émeÂraude coupées par de petits canaux desséchés. Les buffles noirs vous regardent avec leurs grands yeux étonnés ; les dromadaiÂres accroupis ont dans la bouche de grosÂses touffes d’herbe qu’ils mâchent solenÂnellement ; tout à l’entour les troupeaux sont épars et le fellah fume tranquillement sur le seuil de sa hutte de roseaux. Plus loin, c’est une charrue primitive, à laquelle sont attelés fraternellement un chameau et une vache ; debout sur le tronçon d’une colonne, un jeune garçon souffle dans un chalumeau ; des femmes passent ; les plus vieilles ramènent précipitamment sur leur visage, à la vue de l’étranger, les plis de leur voile ; des enfans vêtus d’une loque, de petits diables noirs, se roulent dans la poussière à l’entrée du village d’Harabah-medfouneh, et courent après moi, selon l’usage oriental, pour me demander un bakhchich ; j’arrive aux ruines, et je suis émerveillé de la fraîcheur des peintures décoratives du grand temple de Séti, déÂblayé tout récemment par les ordres du khédive, et sous la direction de M. MarietteMariette, François-Auguste-FerdinandFrançois-Auguste-Ferdinand Mariette (Boulogne-sur-Mer, 11 février 1821 – Le Caire, Egypte, 18 janvier 1881), archéologue et égyptologue. En 1841, il fit la découverte, au musée de sa ville, d’un caisson de momie et chercha à connaître la signification des hiéroglyphes. Alors, tout en enLire la suite…. C’est dans ce temple qu’a été découverte une table de rois plus complète et mieux conservée que celle dont s’est enrichi le musée de Londres : « Séti roi et Ramsès encore prince, dit le savant directeur du musée de Boulaq, y sont représentés debout, l’un faisant l’ofÂfrande du feu, l’autre récitant l’hymne saÂcré. Devant eux sont rangés, comme dans une sorte de tableau synoptique, les cartouÂches des soixante-seize rois (Séti s’y comÂprend lui-même) auxquels ces hommages sont dédiés, et ce n’est pas sans une cerÂtaine émotion qu’en tête de la liste on voit paraître le nom de Ménès, l’antique et véÂnérable fondateur de la monarchie égypÂtienne. »
En montant vers le nord on trouve une enceinte de briques crues. C’est là , ajoute M. MarietteMariette, François-Auguste-FerdinandFrançois-Auguste-Ferdinand Mariette (Boulogne-sur-Mer, 11 février 1821 – Le Caire, Egypte, 18 janvier 1881), archéologue et égyptologue. En 1841, il fit la découverte, au musée de sa ville, d’un caisson de momie et chercha à connaître la signification des hiéroglyphes. Alors, tout en enLire la suite…, que fut Thines, le berceau de la monarchie égyptienne ; c’est là aussi que fut le tombeau de l’Osiris d’Abydos, qui était pour les habitans de l’Egypte ce que le Saint-Sépulcre est pour les chrétiens.
Après être resté deux heures seulement au milieu des ruines, il m’a fallu reprendre le chemin de Billianeh. On ne s’appartient pas quand on voyage sur un bateau à vaÂpeur de la Compagnie Cook. D’ailleurs le soleil allait disparaître ; le ciel s’empourÂprait déjà de ses derniers rayons. Tout en marchant, je regardais les teintes de l’occident et je voyais peu à peu grandir cette ombre qui allait bientôt envelopper le payÂsage ; dans le lointain, on entendait ce bruit particulier aux campagnes de tous pays quand la journée est finie, et l’air, un air tiède et vaporeux, m’envoyait les efÂfluves embaumées du soir. Tout était tranquille ; mon coursier aux longues oreilles avait ralenti son allure ; et je songeais, en apercevant au loin la blanche cheminée du Saïda, que pour les plus charmans voyages il est quelquefois de tristes retours.
C’est en descendant le Nil que nous nous sommes arrêtés à Billianeh pour faire l’excursion d’Abydos. Le surlendemain nous étions à Syout. Entre Minieh et Beni-Souef, le même moine copte, dans le même costume, est venu s’accrocher grelottant à la poupe du navire et nous a demandé, au nom du Dieu des chrétiens, dont il se dit le serviteur fidèle, une bouteille d’araki et un bakhchich.
Le 1er février, je revenais au Caire et j’allais entendre Aïda pour la cinquième fois, le jour même de mon arrivée.
Hier, Mme Marie Sass, dont je ne vous ai pas encore parlé, je crois, chantait le TrouÂvèreTrouvère, LeLe Trouvère, opéra en quatre actes sur un livret en français d’Emilien Pacini traduit du livret en italien de Salvatore Cammarano, Il trovatore, mis en musique par Giuseppe Verdi. La version en français fut créée d’abord au Théâtre de la Monnaie à Bruxelles le 20 mai 1856 puis a l’OpÃLire la suite… demain, elle chantera la JuiveJuive, LaLa Juive, opéra en cinq actes sur un livret d’Eugène Scribe mis en musique par Fromental Halévy et créé à l’Opéra de Paris le 23 février 1835.Lire la suite…, et on donne mardi à son bénéfice la Fille du réÂgiment.Fille du Regiment, LaLa Fille du régiment, opéra-comique en deux actes sur un livret de Jean-François-Alfred Bayard et Henri de Saint-Georges mis en musique par Gaetano Donizetti et créé à l’Opéra-Comique le 11 février 1840.Lire la suite… Avant de partir pour la Haute-Egypte, je l’avais entendue dans FaustFaustFaust, opéra en cinq actes sur un livret de Michel Carré et Jules Barbier d’après Goethe mis en musique par Charles Gounod et crée au Théâtre-Lyrique le 19 mars 1859.Lire la suite…, un rôle qui ne semble pas écrit pour elle, et dans lequel cependant elle montre une souÂplesse de talent que je ne lui soupçonnais pas. Les oppositions de style que l’on trouve dans l’œuvre de M. GounodGounod, CharlesCharles Gounod (Paris, 17 juin 1818 – Saint-Cloud, 18 octobre 1893) compositeur. Gounod étudia le piano avec sa mère et la composition et l’harmonie en privé avec Reicha tout en faisant d’excellentes études classiques au Lycée Saint-Louis à Paris. Après avoir obtenu son baccalauréat, il Lire la suite… en rendent l’exécution fort difficile pour la plupart des cantatrices, et si beaucoup s’y sont esÂsayées, peu y ont réussi. Nous l’avons bien vu à Paris, où Mme Carvalho reste encore la seule, la vraie Marguerite. Et bien ! je vous assure que Mme Sass dit la ballade du roi de Thulé et l’air des bijoux avec une grâce charmante et une légèreté qui paraît toute naturelle. Evidemment on est moins surpris de la façon dont elle chante la belle phrase du trio final ; là elle déploie toute l’ampleur, toutes les sonorités de son admirable organe, et c’est une grande émoÂtion dans toute la salle. On oublie en ce moment que Mme Marie Sass est une artiste française (née en Belgique), et on l’applaudit comme si elle venait de Florence ou de Milan.
Le théâtre du Caire est un théâtre plus italien que pas un théâtre d’Italie. Il a été bâti en six mois : commencé au mois d’aÂvril de l’année 1869, on l’a inauguré le 6 novembre ; et, pendant la première saison, on n’y a pas donné moins d’une quinzaine d’ouvrages, opéras et ballets, dont les costumes, les décors et tous les accessoires, ont été confectionnés, peints et fabriqués par des ouvriers et des artistes parisiens.
Ce théâtre, qui contient moins de monde que le théâtre des Variétés (de 800 à 850 perÂsonnes seulement), est cependant beaucoup plus grand, et aussi y est-on beaucoup plus à l’aise ; les loges sont fort belles, les rangs de stalles sont suffisamment espacés pour qu’on y circule librement. Quand on aura donné à la scène les dégagemens inÂdispensables aux évolutions des grands cortèges et aux promenades triomphales, le théâtre du Caire n’aura plus rien à désirer, qu’une affluence plus considérable de spectateurs. Dès la seconde représentation d’un ouvrage quelconque, même quand il a obtenu du succès, on voit des vides dans la salle. Chaque saison, dont la durée est de cinq mois, ne produit pas plus de 100,000 fr. de recette ; les abonnemens rapportent 177,000 fr., et comme les dépenses s’élèvent à plus de 1 million, cela donneÂrait un assez joli déficit si le théâtre ne reÂcevait pas du khédive une subvention vraiÂment royale, 800,000 fr. par an.
Le personnel est fort nombreux relatiÂvement : il se compose de cinquante-quatre musiciens d’orchestre, soixante-quatre choÂristes, quatre-vingt-deux danseurs et ballerines, sans compter la figuration, et de vingt premiers sujets. Au théâtre du Caire, il n’y a que des premiers rôles et des choÂristes ; les seconds rôles n’existent pas. J’aime cette façon délicate de sauvegarder l’amour-propre des chanteurs, amour-proÂpre sans limites, et je m’étonne qu’un usage si excellent ne soit pas généralement adopté dans les théâtres européens.
Mme Pozzoni-AnastasiPozzoni-Anastasi, AntoniettaAntonietta Pozzoni-Anastasi (Venise, 1847 – Gênes, 8 avril 1917), soprano puis mezzo-soprano. Sa famille s’installa à Saint-Pétersbourg alors qu’elle était encore enfant, et c’est là qu’elle étudia le chant avec Spinelli. De retour en Italie, elle étudia au Conservatoire de Milan avLire la suite…, que je n’ai encore entendue que dans le rôle d’Aïda qu’elle chante d’une manière tout à fait remarquable, est une artiste de grand mérite et douée d’un sentiment dramatique bien suÂpérieur à celui de la plupart des cantatrices italiennes. Sa voix est très étendue, et d’un timbre sympathique. J’avais cru que le rôle d’Aïda était écrit un peu haut pour Mme PozzoniPozzoni-Anastasi, AntoniettaAntonietta Pozzoni-Anastasi (Venise, 1847 – Gênes, 8 avril 1917), soprano puis mezzo-soprano. Sa famille s’installa à Saint-Pétersbourg alors qu’elle était encore enfant, et c’est là qu’elle étudia le chant avec Spinelli. De retour en Italie, elle étudia au Conservatoire de Milan avLire la suite… et que par cela même elle devait éprouver, à le chanter comme elle le chante, une certaine fatigue ; mais il paraît que je m’étais étrangement trompé.
Mme GrossiGrossi, EleonoraEleonora Grossi (ca. 1837 – Naples, ? janvier 1879), mezzo-soprano. Elle étudia au Conservatoire de Naples avant de faire ses débuts à 18 ans à Messine dans le rôle-titre de La Cenerentola (Rossini). De 1860 à 1862, elle fut engagée au Théâtre San Carlo de Naples, où elle se produisit Lire la suite… est bien connue du public parisien ; elle a toujours sa belle voix de contralto, dont les cordes basses surtout ont une sonorité harmonieuse pleine de charme.
J’entendrai demain Mme Contarini dans le rôle d’Eudoxie de la JuiveJuive, LaLa Juive, opéra en cinq actes sur un livret d’Eugène Scribe mis en musique par Fromental Halévy et créé à l’Opéra de Paris le 23 février 1835.Lire la suite…, et j’espère que vous voudrez bien attendre mon retour à Paris pour savoir ce que je pense de la voix et du talent de Mme Contarini.
M. StellerSteller, FrancescoFrancesco Steller ( ? – ?), baryton. Il se produisit sur les scènes des théâtres d’Italie puis à Moscou et à Barcelone (mars 1863) avec beaucoup de succès. Du 10 décembre 1867 à la fin mars 1868, il fut engagé au Théâtre-Italien de Paris puis au Théâtre de Trieste, avant de reveniLire la suite… a été, comme Mme GrossiGrossi, EleonoraEleonora Grossi (ca. 1837 – Naples, ? janvier 1879), mezzo-soprano. Elle étudia au Conservatoire de Naples avant de faire ses débuts à 18 ans à Messine dans le rôle-titre de La Cenerentola (Rossini). De 1860 à 1862, elle fut engagée au Théâtre San Carlo de Naples, où elle se produisit Lire la suite…, penÂsionnaire du Théâtre-Italien de Paris, sous la direction de M. BagierBagier, Charles-ProsperCharles-Prosper Bagier (Niort/Deux-Sèvres, 8 mai 1811 – Paris, 31 mai 1881), agent de change et directeur. Il était le fils de François Bagier, sellier à Niort et de Renée Mathieu son épouse ; on sait très peu de choses sur sa formation. Il devint agent de change et fit une fortune considÃLire la suite…. Mais M. MediniMedini, PaoloPaolo Medini (Bologne, Italie, 25 janvier 1837 – Salò/province de Brescia, Italie, 2 janvier 1911), basse. Très populaire sur toutes les scènes européennes, il excellait dans Rigoletto (Verdi), Don Carlos (Verdi), Les Huguenots (Meyerbeer) et L’Africaine (Meyerbeer). Il devint plus tard le cLire la suite…, le grand-prêtre d’Aïda, le Méphistophélès de FaustFaustFaust, opéra en cinq actes sur un livret de Michel Carré et Jules Barbier d’après Goethe mis en musique par Charles Gounod et crée au Théâtre-Lyrique le 19 mars 1859.Lire la suite…, est un artiste que je ne connaissais pas et que je suis très enchanté de conÂnaître. Il a un magnifique organe, une belle prestance, et on le dit très bon musicien. Quant à M. MonginiMongini, PietroPietro Mongini (Rome, 29 octobre 1839 – Milan, 27 avril 1874), basse puis ténor. Il fit ses débuts comme basse avant d’être engagé comme ténor à Gênes en 1853. En 1855, il débuta au Théâtre-Italien de Paris dans Lucia di Lammermoor (Donizetti). Deux ans plus tard, à Reggio Emilia, il crLire la suite…, ce n’est certaiÂnement pas un chanteur sans mérite, puisqu’il chante pour la bagatelle de cent mille francs par saison ; mais sa voix a, dans les notes élevées, des inflexions gutÂturales que je n’aime point, et qu’il est rare aujourd’hui de ne pas rencontrer chez les ténors de la Péninsule comme chez les ténors d’outre-Rhin.
Le théâtre du Caire est dirigé par S. Exc. Drahnet-Bey [Draneth-Bey], qui a le titre de surintendant et ne dépend d’aucun ministère. Il est par conséquent maître absolu chez lui. Le khéÂdive lui accorde une confiance sans bornes, et bien justifiée, du reste, par l’infatigable activité et le zèle qu’il déploie dans des fonctions très difficiles et très délicates aussi. Depuis la fondation du théâtre, on y a représenté plus de trente ouvrages itaÂliens et français : la JuiveJuive, LaLa Juive, opéra en cinq actes sur un livret d’Eugène Scribe mis en musique par Fromental Halévy et créé à l’Opéra de Paris le 23 février 1835.Lire la suite…, la MuetteMuette de Portici, LaLa Muette de Portici, opéra en cinq actes sur un livret d’Eugène Scribe et Germain Delavigne mis en musique par Daniel-François-Esprit Auber et créé à l’Opéra de Paris le 29 février 1828.Lire la suite…, FaustFaustFaust, opéra en cinq actes sur un livret de Michel Carré et Jules Barbier d’après Goethe mis en musique par Charles Gounod et crée au Théâtre-Lyrique le 19 mars 1859.Lire la suite…, Fra-Diavolo, Don Giovanni, la FaÂvorite, Norma, Sémiramis, les Huguenots, Crispino e la Comare, le Barbier, l’Elisire d’amore, Aïda et la plus grande partie du répertoire de Verdi. La saison prochaine, on montera el GuaraniIl GuaranyIl Guarany, opéra-ballet en quatre actes sur un livret en Italien d’Antonio Scalvini et Carlo d’Ormeville d’après le roman éponyme de José de Alencar mis en musique par Antonio Carlos Gomez et créé au théâtre de La Scala de Milan le 19 mars 1870.Lire la suite…, du maestro Lopez [Gomez], ouvrage donné à Milan avec un certain succès ; Ruy-BlasRuy-BlasRuy-Blas, dramma lirico en 4 actes sur un livret de Carlo d’Ormeville d’après le drame éponyme de Victor Hugo, mis en musique par Filippo Marchetti et créé au théâtre de La Scala de Milan le 3 avril 1869.Lire la suite…, du maestro MarchettiMarchetti, FilippoFilippo Marchetti (Bolognola /Macerata, Italie, 26 février 1831 – Rome, 18 janvier 1902), compositeur. Il entra en 1850 au Conservatoire de Naples, dirigé par Saverio Mercadante, et étudia avec Lillo et Conti. En 1856, son premier opéra, Gentile da Varano, créé à Turin, remporta un grand sLire la suite…, et qui, à ce qu’il paraît, a également réussi sur les premiers théâtres italiens ; i LombardiLombardi alla prima crociata, II Lombardi alla prima crociata (Les Lombards à la première croisade), dramma lirico en quatre actes sur un livret en italien de Temistocle Solera mis en musique par Giuseppe Verdi et créé au Théâtre de La Scala de Milan le 11fevrier 1843.Lire la suite…, la SaffoSaffoSaffo, tragédie lyrique en trois actes sur un livret italien de Savadore Cammarano, d’après la pièce de théâtre de Franz Grillparzer, mise en musique par Giovanni Pacini et créée au théâtre San Carlo de Naples le 29 novembre 1840. L’œuvre connut un très grand succès et fut reprise suLire la suite…, de MercadanteMercadante, SaverioGiuseppe Saverio Raffaele Mercadante (Altamura, baptisé 17 septembre 1795 – Naples, 17 décembre 1870), compositeur. Il étudia au Conservatoire di San Sebastiano de Naples avec Zingarelli. Il composa d’abord de la musique instrumentale (concertos pour flûte et quatuors avec flûte), puis se tLire la suite…, PoliutoPoliutoPoliuto, tragédie lyrique en trois actes sur un livret en italien de Salvadore Cammarano mis en musique par Gaetano Donizetti en 1838 et créée posthumément au Théâtre San Carlo de Naples le 30 novembre 1848. Devant le refus du roi Ferdinand II de Naples en 1838 d’autoriser le représentationLire la suite… et Robert-le-Diable.Robert-le-diableRobert le Diable, opéra en cinq actes sur un livret d’Eugene Scribe et Germain Delavigne, mis en musique par Giacomo Meyerbeer, créé à l’Opéra de Paris le 21 novembre 1831.Lire la suite…
Et comme si ce n’était pas assez d’une si rude besogne pour un seul homme, même quand on l’appelle Excellence et qu’il est surintendant, Drahnet-Bey [Draneth-Bey] va reprendre la direction du Théâtre-Français, où l’on joue le drame, le vaudeville et l’opérette, ce théâtre n’étant point dans une situation bien prospère depuis qu’il a été abandonné à l’industrie privée. J’y ai applaudi hier, car j’étais à la fois, mais non pas en même temps, au Théâtre-Italien et au Théâtre-Français, Mlle Camille Dortet dans le rôle de la comtesse de Terremonde de la PrinÂcesse GeorgesPrincesse Georges, LaLa Princesse Georges, pièce en trois actes et en prose d’Alexandre Dumas, fils, créée au théâtre du Gymnase le 2 décembre 1871.Lire la suite…, et Mme SamarySamary, Marie-Louise-AntoinetteMarie-Louise-Antoinette Samary (Paris, 24 avril 1848 – Jouy-le-Châtel/Seine-et-Marne, 22 juin 1941) actrice. Elle étudia au Conservatoire de Paris, où elle obtint un premier accessit en comédie en 1863. Elle se produisit au Théâtre du Gymnase, à Bruxelles en 1868, puis à Florence, à Milan, Lire la suite… dans celui de la princesse. Mlle DortetDortet, Suzanne-Camille-FernandeSuzanne-Camille-Fernande Dortet (Paris, 13 mars 1848 – 21 mars 1932) actrice. Elle étudia au Conservatoire de Paris, où elle obtint un premier accessit en comédie en 1864. Elle se produisit au Théâtre du Gymnase, au Théâtre de la Gaité et au Théâtre Français du Caire entre 1872 et 1876.Lire la suite… et Mme SamarySamary, Marie-Louise-AntoinetteMarie-Louise-Antoinette Samary (Paris, 24 avril 1848 – Jouy-le-Châtel/Seine-et-Marne, 22 juin 1941) actrice. Elle étudia au Conservatoire de Paris, où elle obtint un premier accessit en comédie en 1863. Elle se produisit au Théâtre du Gymnase, à Bruxelles en 1868, puis à Florence, à Milan, Lire la suite… sont les nièces d’Augustine et de Madeleine Brohan, ce qui veut dire que ce sont des comédiennes de bonne race ; une jeune et charmante actrice, Mlle LouvenardLouvenard, Catherine-AugustineCatherine-Augustine Louvenard (Colmar, ca. 1844 – Boulogne-Billacourt, 9 juillet 1909), actrice.Lire la suite…, joue avec beaucoup d’aisance et de distinction le petit rôle épisodique créé au Gymnase par Mme FromentinFromentin, Henriette-Léontine-Joséphine Deveaux dite MmeHenriette-Léontine-Joséphine-Henriette Deveaux dite Mme Fromentin (Dieppe, 5 février 1840 – Paris, 9 janvier 1887), actrice. De 1857 à 1861, elle joua des rôles d’ingénues à Rouen et fut remarquée par Hippolyte Cogniard qui l’engagea au Théâtre des Variétés à Paris, où elle débuLire la suite…. On donne assez souÂvent, au Théâtre-Français du Caire, mais je n’ai point encore assisté à des spectaÂcles de ce genre, les opérettes de M. OffenbachOffenbach, JacquesJacques Offenbach (Cologne, 20 juin 1819 – Paris, 5 octobre 1880), violoncelliste et compositeur. Il se produisait dans les salons et en concerts lorsqu’Arsène Houssaye, qui voulait réformer l’orchestre du Théâtre-Français, lui offrit, par contrat signé le 30 juillet 1850, le poste de chLire la suite…, de M. LecocqLecocq, Alexandre-CharlesAlexandre-Charles Lecocq (Paris, 3 juin 1832 – Paris, 24 octobre 1918), compositeur. Il étudia au Conservatoire de Paris, où il obtint un 1er prix d’harmonie et d’accompagnement en 1850 puis un 2e prix de contrepoint et fugue deux ans plus tard. Au Conservatoire, il côtoya Georges Bizet et Lire la suite… et de M. François BazinBazin, François-Emmanuel-JosephFrançois-Emmanuel-Joseph Bazin (Marseille, 4 septembre 1816 – Paris, 2 juillet 1878), compositeur. Il étudia au Conservatoire de Paris et obtint le premier Prix de Rome en 1840. En 1849, il fut nommé professeur d’harmonie et d’accompagnement au Conservatoire. Il eut notamment pour élèves Lire la suite….
Quel malheur qu’on ne puisse pas échapÂper à sa destinée ! Il me semblerait infiniment plus doux, au lieu d’aller m’enfermer dans une salle de spectacle, de me promeÂner le soir, si à une certaine heure l’entrée n’en était défendue par une grille infranÂchissable, dans ce beau jardin de l’Esbékieh où il y a des grottes et des cascades, des kiosques et des belvédères, des ponts rustiques et des lacs entourés de gazon vert, de beaux arbres et des fleurs odoÂrantes, des tourniquets où l’on paie une piastre et des becs de gaz. Dans vingt ans on se demandera si Gérard de NervalNerval, Gerard deGérard Labrunie dit Gérard de Nerval (Paris, 22 mai 1808 – Paris, 20 janvier 1855), écrivain, journaliste, librettiste. Il se lia d’amitié avec Théophile Gautier pendant ses études et comme lui fut journaliste (Le Monde artistique, La Presse, L’Artiste). En 1829 il donne une traduction dLire la suite… n’a point rêvé lorsqu’il a décrit certains quarÂtiers du Caire où, même aujourd’hui, on ne trouve presque plus le moindre vestige des usages, des mÅ“urs et de l’architecture de l’Orient, dont les plus beaux spécimens sont presque des ruines. Et ce sera peut-être la gloire d’un artiste français, d’Ambroise BaudryBaudry, AmbroiseAmbroise Baudry (Napoléon-Vendée aujourd’hui La Roche-sur-Yon/Vendée, 1er juillet 1838 – Paris, 3 juillet 1906), architecte. Il étudia à l’Ecole des beaux-arts de Paris avec Hippolyte Lebas et Louis-Victor Louvet. En 1861, il fut nommé inspecteur des travaux de la construction de l’opÃLire la suite…, le frère du peintre illustre, d’avoir fait revivre dans des constructions qui auÂront leur place au centre du quartier euÂropéen, toutes les merveilles, toutes les élégances, toutes les délicatesses de cette architecture.
Ce quartier européen est vraiment suÂperbe, mais je me soucie peu de retrouver, à plus de six cents lieues de Paris le bouÂlevard du Prince-Eugène, le square des Batignolles et l’avenue de Lamotte-Piquet, nos lourdes casernes et nos maisons plates et monotones dans leur uniformité. J’aime mieux les mosquées ornées de stalactites, et les rues étroites avec leurs maisons aux moucharabiehs dentelées, et, les bazars, abrités du soleil où s’étalent les beaux taÂpis de Perse et les longues karamanies, les narghilés incrustés de cuivre et les vieilles armes circassiennes, les grands vases de Chine, les bronzes japonais, les faïences anciennes et les émaux cloisonnés. Je préÂfère le café mousseux que vous sert un Barbarin dans quelque coin éloigné du vieux Caire à celui que l’on boit au Divan oriental, et je ne suis jamais si heureux que lorsque je chevauche sur mon baudet, à travers le Khan-Khalil ou les tombeaux des califes, en compagnie de mon fidèle ânier Schahabaham.
Et tandis que je chevauche, ainsi, ferme et droit sur mes étriers, j’oublie qu’il se fait à Paris des chutes qui pourraient faire croire à un revirement dans le goût-musiÂcal du public parisien, si l’on ne savait combien peu il faut se laisser prendre à ces signes trompeurs.
Est-il donc vrai, comme les journaux l’affirment, que le Roi CarotteRoi Carotte, LeLe Roi Carotte, opéra-bouffe en quatre actes sur un livret de Victorien Sardou, mis en musique par Jacques Offenbach et créé au théâtre de la Gaîté le 15 janvier 1822.Lire la suite… n’a pas réussi ; que la Tour du Chien vertTour du chien vert, LaLa Tour du chien vert, opérette en trois actes sur un livret de Philippe Gille mis en musique par Jules Duprato et créé au théâtre des Folies-Dramatiques le 21 décembre 1871.Lire la suite… fait regretter la Boîte de PandoreBoite de Pandore, LaLa Boite de Pandore, opéra-comique en trois actes sur un livret de Théodore Barrière mis en musique par Henri Litolff et créé au Théâtre des Folies-Dramatiques de Paris le 18 octobre 1871.Lire la suite…, et que FantasioFantasioFantasio, opéra-comique en 3 actes sur un livret de Paul de Musset, d’après la comédie d’Alfred de Musset, mis en musique par Jacques Offenbach et créé au Théâtre de l’Opéra-Comique de Paris le 18 janvier 1872.Lire la suite… n’a point trouvé grâce devant des spectateurs ordinairement si bienveillans et si peu difÂficiles ?
E.Reyer
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Notes d'édition
Cet article sera repris dans le recueil Notes de Musique qu’Ernest Reyer publiera chez Charpentier et Cie, à Paris en 1875 mais en omettant la salutation initiale: « Mon cher Directeur, »
Dans Notes de Musique, dahabiehs est féminisé « … sur d’élégantes dahabiehs… »
Dans Notes de Musique, Reyer omet la mention « qu’elle chante d’une manière tout à fait remarquable »
Reyer commet une confusion. Mercadante n’a pas composé d’opéra sous ce titre ; c’est Pacini qui est l’auteur d’une Saffo (1840) qui eut beaucoup de succès sur les scènes d’Italie. Le théâtre de La Scala de Milan, après avoir donné en septembre 1871 Il Guarany de Gomes, donnait en 1872 Il Giuramento de Mercadante ainsi que le Ruy Blas de Marchetti. Reyer s’est trompé de titre pour l’œuvre de Mercadante.
Dans Notes de Musique, Reyer introduit un deux-points avant « Excellence » : « …même quand on l’appelle : Excellence… »